Eclipse Totale du Soleil
26 Mars 2006


1. Introduction.

Lieu
Camp militaire sur le plateau de Salloum (ou As Salloum, ou Salum, ou El Salum) en Egypte près de la frontière Lybienne. Latitude 31°34'N, Longitude 025°09'E
Matériel
Canon EOS 350D + Canon Extender EF 2x II + Canon Zoom EF 100-400mm f/4.5-5.6 L IS USM + Déclencheur externe Canon RS-60E3 + Trépied Velbon.
Canon EOS 5D + Canon Zoom EF 16-35mm f/2.8 L USM + Déclencheur externe Canon TC-80N3 + Trépied Hama Profil 23.
Canon EOS D60 + Peleng 8mm f/3.5 + Trépied NoName.
Notes
1. Merci Papa pour ce prêt du 350D, 17-85mm, trépied Hama, déclencheur externe, etc... Grâce à ça, j'ai pu obtenir de belles photos sur les protubérances... (l'excellente qualité optique du 100-400 y est pour quelquechose également!)
2. Toutes les photos ont été prises au format brut Canon RAW. Elles ont été traitées sous le logiciel Canon Digital Photo Professional 2 qui permet de jouer facilement sur les paramètres de Contraste, Netteté, Balance et Nuances des couleurs, Compensation de l'exposition numérique. J'ai ainsi pu obtenir un soleil jaune orangé à travers le filtre AstroSolar BAADER au lieu d'un ton rose violet en mode Balance des couleurs automatiques, mais aussi corriger toutes mes erreurs comises pendant l'éclipse! Une fois les images converties en jpeg, elles ont été traitées sous Paint Shop Pro X... mais pas toutes!.
Lien
Carte provenant du site de Fred Espenak:
   Carte globale de l'éclipse totale de soleil.
   Carte montrant le passage de l'éclipse sur le continent Africain.
   Carte détaillant le passage en Lybie et en Egypte.
Site de Denis Joye avec qui j'ai observé.
Site de Denis Pierret avec qui j'ai observé.
Sites de Francis Willm avec qui j'ai observé: 1 et 2.
Phases
Location Name    Latitude Longitude  Elev.       First Contact       Second Contact       Third Contact         Fourth Contact           Maximum Eclipse       Eclip. Eclip. Umbral  Umbral
U.T. P V Alt U.T. P V U.T. P V U.T. P V Alt U.T. P V Alt Azm Mag. Obs. Depth Durat.
m h m s ° ° ° h m s ° ° h m s ° ° h m s ° ° ° h m s ° ° ° °
EGYPT
As-Sallum 31°34'N 025°09'E – 09:20:09.9 226 252 58 10:38:08.9 55 49 10:42:03.9 216 208 11:59:59.4 46 10 54 10:40:06.5 316 308 62 188 1.051 1.000 0.830 03m55s


2. Carnet de voyage.

    Je me souviens très bien de ce début du mois de Décembre 2002 quand on s'était fixé rendez-vous avec Denis pour la prochaine éclipse totale de soleil... en Mars 2006! Je m'étais dit qu'on avait le temps de la voir venir. Depuis, je n'ai pas vu le temps passer. Nous voici donc déjà en fin Mars 2006... Il est donc impératif de commencer à préparer la suivante: le 1er Août 2008!

    Pour ce voyage, Denis s'est occupé de tout et j'ai juste eu à dire : "Oui, je suis partant!". Merci encore à lui pour tout le travail et le temps consacré aux préparatifs de ce genre de voyage, surtout via une agence non basée en France, égyptienne en l'occurrence: Best Way Travel - Egypt. Cette fois-ci, il a réussi à regrouper 18 personnes, de Paris et du Sud! Pas mal!

    Au programme de ce voyage de 5 jours, visite d'El Cairo: Pyramides sur le plateau de Giza ou Guizeh (Mykerinos, Khéphren, et Khéops), le Grand Sphinx, le musée national égyptien recélant l’incroyable trésor de Toutânkhamon, un souk, le quartier copte, des mosquées. Etape à Alexandria: visite des monuments Kom El-Shugafa, du théâtre Romain, et le phaaaaaare d'Aleeeeeeexandriiiiiiiiiiiiiiiiiie... pardon... Puis direction Saloum en traversant le désert côtier d'Egypte...

    Très difficile, voire impossible, d'oublier le but premier de ce voyage lorsqu'on est un groupe comprenant principalement des astronomes amateurs... il se passe rarement une heure sans que quelqu'un scrute le ciel, de nuit comme de jour, et le commente... Ah, le ciel est voilé, c'est pas bon pour l'éclipse... Ah, il pleut, pourvu que ça ne soit pas comme ça le jour de l'éclipse... T'as vu Vénus?... Et Jupiter, il est où?... Pas mal Orion!... Bref, ça a entretenu en moi ce petit stress de la météo désastreuse et de la peur de perdre mes moyens le jour J. Encore heureux que le groupe était au fond porteur de bonnes humeurs, de franches rigolades avec les calembours, blagues, contrepétries et jeux de mots en tout genre de Denis Premier, Denis Second, Francis...

    Pour parler du jour de l'éclipse, mieux vaut commencer par s'étaler sur celle de la veille en fait, car la journée de traversée dans le désert entre Alexandrie et Saloum fut tout simplement épique! Le programme de la journée de ce 28 Mars 2006 était somme toute fort simple. Partir tôt de l'hôtel, comme à l'accoutumé, et filer en direction de Saloum pour arriver au camp vers 15h, assaisonné au milieu d'une visite d'un cimetière militaire. Une journée ennuyeuse en fait. Que nenni! Le début de la journée a malgré tout tenu ses promesses, c'est-à-dire rien de trépidant! Nous fîmes une pause déjeuner à Marsa Matrouh dans un excellent restaurant 'local' servant des kebabs du bonheur. Avant de repartir, Alaa offre une canne à notre papi Denis qui s'est claqué le mollet la veille suite à un sprint vif sous stress pour traverser une rue à Alexandrie... Vu le style égyptien de conduite, c'est vrai qu'il y a craindre pour sa vie lorsqu'on rejoint l'autre côté de la chaussée à travers cette circulation locale. D'un point de vue d'un occidental comme moi, ça ressemble à un chaos hallucinant. Il n'y a pas de règles! Mais c'est finalement un chaos 'organisé' car on n'a pas été témoin d'accrochage. Il doit suffire de pouvoir jongler avec le klaxon, les phares et le volant avec ses deux mains, et d'oublier tout type de concepts de courtoisie, amabilité et politesse sans pour autant être agressif. Bon Abdu notre chauffeur, on a compris par moment qu'il avait des mots durs dans sa langue natale, mais on a jamais vu un autochtone jaillir hors de son véhicule pour tabasser son voisin...

    Pour en revenir à cette journée, l'histoire trépidante commença en milieu d'après-midi, lorsque notre bus se mis sur le bas côté... Quelques minutes passent et je ne prête aucune attention particulière à cet arrêt. Et petit à petit, je commence à comprendre que soucis, il y a. Il fallu attendre un bout de temps avant qu'Alaa nous explique que le câble d'accélérateur a laché et qu'Abdu n'arrive pas à dévisser le pare-choc avant du car pour cause de vieilles vis usées et rouillées. A ce moment là, je ne peux pas dire que le stress monta d'un cran chez moi. Je reste serein et me convaincs que cette panne fera vite rapidement partie du passé. Tssé tssé me dira le futur de cette histoire. Ce satané pare-choc ne veut pas se laisser démonter et ce câble reste inacessible! Là, le niveau stress se relève! Bon on fait quoi alors? On ne va pas rester ad vivam eternam perdu dans ce désert!! Il est où le car de secours?? On a malgré tout et malgré eux un car de la même agence de voyage qui reste avec nous. D'autres cars s'arrêtent, mais sans aide concluante. Tout le monde est sorti du car. On plaisante sur cet évènement. Je n'ai déjà pas trop le coeur à ça. La police est là. On n'est pas prêt de repartir. Histoire de ne pas nous inquiéter d'avantage, l'organisateur commence à vider le car de nos boites de pitances pour le soir et le lendemain. On nous rassure en nous disant que nous avions également à bord les boites pour nos amis belges d'à côté. Bon d'accord... Passons... Et puis finalement, je ne sais pas qui a eu cette idée de génie de type égyptienne, mais ils accèdent au truc d'accélérateur à l'arrière du car auquel ils attachent une corde qui remonte à l'intérieur du car. Après une courte négociation avec la police, c'est parti mon kiki. Abdu au volant et au frein, et son collègue à l'accélérateur par la corde à l'arrière...

    Personnellement, j'aurais été d'avis de finir la route par cette méthode. Non mais je tiens à ce que ce soit clair: Il est hors de question de manquer l'éclipse à cause de la défaillance d'un car! Apparemment, la négociation avec la police était de rejoindre le village local le plus proche pour réparation... Du moins, pouvoir accéder à ce câble... Certes, c'est plus prudent. On arrive dans un village isolé de chez isolé, pas loin de Nagala (ou Nagala même..). On devient très rapidement l'attraction du village. La police est toujours là. On trouve "le garage" du bled. Je sens que ces moments vont être mémorables. Au début, on ne sort pas du car. Ca craint, ça craint pas? Et je suis peut-être le seul à me demander "Quand est-ce qu'on part?". Bref, le stress gravit un nouvel échellon mais je reste en apparence calme. Finallement, tout le monde descent! Ce petit air frais va nous faire le plus grand bien. Un attroupement s'est formé autour de nous.
Marie-Claude s'éclate à faire des photos des gosses du village, tandis que d'autres iront boire un café ou un thé dans le PMU du coin. Ca s'aglutine à l'avant du car pour regarder celui qui travaille. Abdu, le mécano, et d'autres tournent à tour de role pour essayer de déboulonner ce con de pare-choc. Ils y vont au marteau burin. Ils arrivent à "dévisser" un côté. Youhou! Reste plus que le second côté! Le soleil se couche. C'est magnifique mais je n'ai pas pour autant le coeur à faire une photo. Et zou, le stress monte encore. Vas-y, respire Philippe. C'est dans ces moments là où on se demande si on est damné?! Je reste à côté du bus pour voir comment ça avance. La nuit tombe vite. Le démontage complet du pare-choc ne progresse pas. Ces fichus boulons semblent être bien foutus! Il fait nuit. Le deuxième côté cède enfin! YES! Allez, le câble maintenant! Abdu nous demande de regagner l'intérieur du car car il fallait calmer l'enthousiasme local et dépeupler les abords du bus! Bon ben voilà... On est à l'intérieur et on attend. Sont bienvenus les locaux qui en voiture n'hésitent pas à rouler à fond à contre sens dans le village avec la police à nos côté... Ca détend un peu...

    L'accompagnateur recommence à jouer avec nos boites de subsistances et chacun se voit attribuer son dîner et petit déjeuner... Bien bien bien. Serait-ce le moment stratégique pour vérifier qu'aucune boite ne manque? Pas sur... Certains, dont moi, commenceront à manger bien que l'appétit ne soit pas au rendez-vous. Je finis presque la boite pourtant généreusement rempli. On nous annonce que la réparation est en bonne voie. Cela va t'il m'aider à enlever ce mal de ventre qui se profile? Tourista? Stress? Abdu rentre dans le car, appuis sur l'accélérateur, et ça marche. Yahla! On va pouvoir partir et regagner le camp de Saloum in cha allah. La police nous escorte pour regagner l'autoroute à coup de sirène Hollywoodienne. Si ça c'est pas la grande classe! Il doit être 20h et il nous reste à parcourir dans les 150km. Rien à signaler sur le reste du parcours. On traverse Saloum et on grimpe en quelques lacets sur le plateau à 300-400m d'altitude où sont installés les camps préparés depuis 1-2 mois par les militaires égyptiens. Après un petit détour dans le carré VIP et Presse, on arrive à trouver notre camp jaune. Après quelques instants de patience, on nous attribue nos belles tentes spatieuses. On sera 4-5 par tente. Je suis avec Marie-Claude, Sophie et Sonia. Il est 22h30.

    On decide de faire une virée dans ce camp avant d'aller se coucher pour voir les animations orientales qui nous sont proposées. On dirait qu'on arrive un petit tard pour le coup. Tout semble en cours d'extinction. On marche dans cette boue en pleine nuit. Non mais je rêve, depuis quand il pleut dans le désert?? D'après ce qu'on a pu comprendre, il a plu la veille de notre arrivée. Comme quoi, même si statistiquement on a 88% de chance d'avoir un ciel clair, une catastrophe peut arriver. On débarque dans une parcelle où semble prédominer une forte concentration d'italiens et d'espagnols. On leur a attribué une petite zone où beaucoup ont déjà sortis leurs attirails. L'air est chargé en humidité et l'eau ruissellent sur les appareils. A côté se trouve une tente ouverte où des lybo-egyptiens jouent de la musique. C'est hallucinant comme le chanteur ressemble à Kadafi. Sophie en profite pour se réchauffer le corps en se mélant au groupe dansant au son de ces refrains orientaux. Bon, on va rentrer là, y'a du taf demain et mieux vaut éviter d'être crevé. On rejoint notre tente. Denis a dès à présent commencé à monter son équipement et s'essaye pour mettre en station avec son stylo laser. Il va commencer par changer les piles, ça sera mieux pour pointer la polaire. Vu notre emplacement (sous un joli lampadaire) et cette brume, il est assez difficile de trouver l'étoile polaire... Mais on y arrive. On se donne rendez-vous à 4h30 avec Denis pour la mise en station de sa monture pour de vrai. Et oui, demain, c'est le jour de l'eclipse. Glups. La nuit va être courte. Il est déjà 0h30. On se dit à toute à l'heure. Dans la tente, les couvertures, l'oreillet, le lit sont regorgés d'eau tellement le taux d'humidité est élevé, pour ne pas dire maximum! Je me dis que c'est pas gagné de dormir dans ces conditions... oreillet et lit ultra compacts, froid et humidité, excitation liée à l'éclipse... Je garde pull et polaire et me glisse sous trois couvertures. Ca caille méchant. En fait, je m'effondre en quelques minutes alors que Sonia continue de traficoter sous la tente...

    Driiiiiiing. 4h30. Ca, ça fait très mal. Surtout que je dois me mettre en branle immédiatement pour atteindre ce téléphone qui sonne et l'éteindre rapidement avant de réveiller les autres. Je sors, frais comme un Gardon. Je confirme, je ne suis pas matinal! Putain de brume épaisse. C'est pire qu'hier. Que tout à l'heure je veux dire. Il fait toujours aussi froid et l'humidité doit être à son summum. J'ai l'impression d'halluciner. Je suis dans le désert, dans une humidité comme je n'ai jamais connu! C'est n'importe quoi! Je me faisais une autre idée du désert...  Denis n'est pas encore dehors. J'en profite pour me dégourdir les jambes, histoire de me réveiller pour de bon. Je réalise alors que nous sommes le 29 Mars 2006, ce jour tant attendu. Nous y voilà! Respire Philippe, ça commence dans moins de 7h. Denis est là. Il sort son paquetage. Donc là, avec ce brouillard bien plus épais que la veille, il devient très difficile de trouver Polaris. On y arrive malgré tout. On met en station. Du moins, on fait semblant car Denis a oublié de visser la monture au trépied... Il faut reconnaître qu'à 5h du matin, la probabilité pour faire des conneries est assez élevée. Avant que le jour se lève, on dit bonjour au Scorpion (la constellation) qu'on arrive à voir... Ca sent l'été! Le jour est entrain de se lever. La brume est toujours là. On voit les micro-goutelettes. En quelques minutes, l'eau ruisselle sur les trépieds déjà sortis. Personnellement, j'attends que l'atmosphère s'assèche.

    6h et des brouettes. Normalement, le soleil se lève. Impossible pour lui de percer cette couche épaisse d'humidité dans laquelle nous sommes emprisonnés. Ca ne semble pas s'arranger. C'est pas bon pour le moral! Je fais quelques photos de cette atmosphère pesante. Je vois déjà d'ici la tête des gens lorsque je devrais leur expliquer que j'ai loupé une éclipse dans le désert, à cause de l'humidité... Mais bien sur... Et la marmotte, elle le met où déjà le chocolat? Des wagons de bus défilent sous nos yeux. On voit qu'il y eu des récalcitrants a l'accueil martial d'une douce nuit sous les tentes... Je ne comprends pas ce refus du confort militaire. Il y a de plus en plus de monde.

    Ca n'arrête pas de cogiter dans ma tête pour repérer le meilleur emplacement pour l'observation. Je pense surtout à la photo du chapelet que je veux réaliser à l'ultra grand angle. Je ne dois avoir personne devant moi. Ca me stresse. Je fais des aller-venue dans tous les sens. Je me dis que je vais aller de l'autre côté de la route car j'aurais à coup sur personne devant moi, juste cette garrigue lybo-égyptienne. Je cherche un premier plan pour la photo. Mais j'ai peur aussi d'être viré par les personnes en charge de notre sécurité. Il y a aussi cet espace réservé pour l'observation à l'opposé de nos tentes. Ca pourrait être pas mal avec les tentes en premier plan. En définitive, je décide de rester avec le groupe "Les Joyeux". On est un groupe oui ou non?

    Le soleil tente de timides percées à travers la brume. L'amélioration commence à se faire sentir... Enfin.. J'ai failli attendre. Vers 7h30, on sent que le combat Soleil - Nuages commencent à jouer en faveur de Ra. Petit à petit, les membres de notre groupe se lèvent et ceux qui sont équipés sortent tout! L'humidité semble elle aussi entrain de perdre du terrain... C'est pas trop tôt.

    9h environ. Le temps passe inexorablement... Le stress monte, comme prévu par la théorie. J'en peux plus. On part vers le centre du camp pour récupérer des lunettes spécial Eclipse en souvenir, à défaut de tee-shirt griffé de l'évènement. Ces lunettes sont des merdes sans nom. On essaye de voir le soleil qui joue encore à cache-cache aves les nuages et c'est vraiment  exécrable! Je sors ensuite tout mon matériel hors de la tente. Le ciel n'est pas entièrement dégagé mais qu'importe, c'est en bonne voie. Tout commence déjà à se chambouler dans ma tête. Et avec tout ce monde qui vient d'arriver, cela remet en cause le choix de mon emplacement. Je dois bien rester une bonne vingtaine de minutes avec mon sac et trépieds sous le bras avant de me résoudre à nouveau de rester avec le groupe. Je dispose alors mes trois trépieds en étoile. Un premier, dont je ne déplie pas les pieds, sera utilisé pour la photo du chapelet avec le 5D et le 16-35mm. Un deuxième, à moitié déplié, sera quand à lui le support pour le 350 et le 100-400mm doublé. Le troisième reste sans boitier car je vais continuer à utiliser le D60 avec le fisheye et le 50mm pour faire des photos d'ambiances.

    Claire apparaît avec un tee-shirt Eclipse pour Denis. Je suis jaloux à mort. Est suivie de près par Sophie qui elle aussi ramenera son tee-shirt. Je me décide alors de faire une accélération en direction de la "boutique" car il n'en resterait qu'une dizaine tout au plus. Trop tard! Un individu que je ne qualifierai pas en prend au moins 5 devant moi tandis qu'une autre personne achète le dernier. C'est pas grave... Je cavale à nouveau vers notre French Corner, bien qu'il n'y ait aucune raison valable pour moi de galoper, sauf qu'avoir tout mon matériel sans ma surveillance exposé à la vue de tout le monde et que le début d'éclipse va commencer dans moins d'une heure m'empèche d'avancer paisiblement.

    10h passé. Surêment et lentement, le temps passe. Même s'il reste plus d'une heure avant l'avènement de l'évènement, je n'outre dépasserai pas la frontière de notre French Corner. Je ne me souviens plus trop de cette heure en question. Probablement en train de méditer des ultimes dernières fois mon plan d'attaque pour les paramètres des photos à réaliser. Certainement aussi à regarder l'heure sur mon téléphone portable plusieurs fois par minute. Je ne dis pas que vivre une éclipse est un moment douloureux de stress pire que de rendre visite chez son amis le dentiste, mais c'est un mélange de divers sentiments. On pourrait comparer cela à une dégustation d'un vin ayant une palette aromatique si variée, qu'une fois en bouche, il explose de ses milles saveurs et on reste sans voix pour donner un nom à tous les parfums. Ici, dans le cadre d'une observation d'une éclipse totale du soleil, on est partagé entre plusieurs émotions: D'abord l'excitation liée à la beauté et à la rareté de l'évènement. Ensuite vient l'angoisse due aux peurs sur l'observabilité de la dite éclipse (météo, accès aux lieux). Et pour finir, quand on veut immortaliser cette rencontre astronomique, survient l'anxiété au fait d'être dans les deux états précédents tout en devant réussir différentes prises de vues dans un laps de temps très (trop?) réduits. Et cette frousse peut nous alors nous égarrer dans une panique totale et une précipitation qui nous conduit à rater nos photos. Personnellement, j'ai été à demi entrainé dans ce ravin.

    11h sonne. Une petite photo pour se mettre en route. Jusqu'à 11h20, je ne me souviens plus trop de mes faits et gestes. J'ai dû errer autour de mes trépieds comme une bête sauvage dans une cage. J'ai du également faire le tour des mes appareils photos pour vérifier une dernière fois les réglages. Bref, mon cerveau est à fond!

    11h20. Pow pow pow! Je lance les prises de vue avec le 5D pour le chapelet. Ce n'est plus qu'une question de secondes. Je centre le soleil dans le viseur. Je lache un regard extérieur pour re-vérifier les réglages quand soudain Denis crie "Ca commence! La Lune à 3 4h!". Avec ma main gauche sur le déclencheur externe, je lance la première photo sans regarder dans le viseur. Il est exactement 11h20mn18s heure locale (GMT+2). Puis je regarde. Effectivement, la Lune a commencé son cycle de phagocytement du Soleil. Francis ou Christian (un des deux frêre en fait...) dira "Bon, ce n'est que le premier contact, rien de bien excitant". Pourtant dans ma tête retentit un énorme "Gong" synonyme du départ des festivités! Et si je ne m'étais pas retenu, j'aurais pu faire couler une petite larme mais mieux vaut garder les yeux secs car c'est bien plus pratique pour regarder à travers le viseur. On y est pour de bon. Nous sommes le 29 Mars 2006. Il est 10h20mn UT à Saloum. Le ciel est clair. C'est parti. Ca va être grandiose. Enfin...

    Le premier contact vient d'être passé. La machine est alors lancée. Je déclenche quelques photos à la volée. Et je me prépare à faire une photo toutes les 2mn30s pendant 2h40 manuellement, chronomètre en main. 1h20 avant la totalité. Ca peut paraître long mais le temps passe assez vite dans ce cas là. Je reste concentré et tout se passera bien.

    Avant le deuxième contact, j'essaye d'acquiter ma tache avec minutie, et reste en apparence calme alors qu'au fond je bous. Les photos s'enchainent au rythme programmé. Tout se passe pour le mieux. Un fin voile de nuages passe sur le soleil. Cela permet de garder un bon niveau de stress sur la météo. Au cours de l'évolution de l'éclipse, Marie-Claude et Denis P. s'amusent avec un intercalaire percé pour faire apparaître sur le sol couvert d'un drap blanc les croissants de soleil. C'est le principe de sténopé.

    11h30. Cela fait déjà quelques minutes que les esprits s'échauffent. Le croissant de soleil restant devient très fin et nous baignons dans cette lumière tamisée si particulière à une éclipse de soleil. La diminution de la température se fait ici bien ressentir. J'ai commencé avec la polaire (le pull, pas l'étoile...), que j'ai ensuite retirer pour la remettre à nouveau. Combien de temps avant la totalité? Un quart d'heure! Dix minutes! 5 minutes! Je regarde ma main tenant la télécommande de l'appareil photo. Elle tremble comme une feuille morte. Je sais que je ne suis pas opérationnel à 100%. Mais je ne sais pas à combien je le suis... Je me détache du monde environnant et je rentre dans le mien pour me mieux me canaliser sur mes photos. Je lache quelques regards fugaces en direction du soleil pourtant proscrit pour ne pas se bruler la rétine. Je vois la Lune qui va avaler le Soleil et nous faire sombrer dans la nuit. Commence alors une longue série de photo dans un cadence infernale. Je comptabilise 137 photos en 10 minutes. Vive le numérique!? Pas certain au fond vu le nombre d'erreurs comises.

    11h37. La totalité n'a pas commencé mais je retire le filtre de l'appareil pour prendre en photo les grains de Bailly. Je dois changer les paramètrea de prises de vue pour prendre ce type de photos. Vu mon état, j'accumule les conneries. Je n'arrive pas à activer le mode bracketing. Je n'arrive pas à désactiver le blocage du miroir. Je n'arrive pas à utiliser le mode rafale. Mauvais réglage du temps d'exposition. Oubli du changement de la sensibilité. Ca peut paraître bête mais dans ces moments là, une fois l'exaltation au maximum, il est inutile de vouloir lutter. 11h37mn33s, première photo d'une longue série. Je fais 25 photos en 35 secondes. Ma main gauche est frénétique sachant qu'il faut que j'appuie deux fois sur le déclencheur pour prendre une photo (le blocage du miroir étant toujours activé).

    11h38mn08s. Le moment tant attendu arrive. La totalité commence. Oh putain de merde, la couronne est géante, magnifique, majestueuse. J'entends au loin Denis J. qui s'écrie "Regarder la Couronne, regarder les protubérances". Il est pédagogue dans ces moments là et je me demande comment il fait. Je suis incapable de sortir un seul mot de ma bouche, un peu comme à l'accoutumé. Les jets coronnaux dessinent dans le ciel un admirable sublime et féerique papillon. Mais comment prendre en photo cette merveille? Peu importe et j'oublie de réfléchir, je démarre la séquence de prises de vue comme prévue. Sauf qu'avec le mode bracketing non activé comme prévu, j'effectue une série de photos en triplette. En oubliant de réfléchir tout en voulant regarder l'éclipse de mes propres yeux, je néglige de regarder dans le viseur, et ce depuis 2 minutes au moins. Je regarde un coup et je constate le désastre. Je recentre et redémarre à zéro ma séquence à 11h38mn45s. 40s de perdu sur les 240 qui me sont comptés. Impardonnable! Je fais ma séquence. 32 photos en 1mn30s.

    12h40mn15s. On est en plein coeur de la totalité. Je lache le 350D pour être avec le 5D. J'enlève le filtre et prend une photo. Trop exposé. Le numérique s'avère utile dans ce cas là. J'en reprends une série de 6 photos, histoire d'être certain qu'il y en aura une de bonne. Pendant cette série, je vais vers le D60 pour faire une photo avec le fisheye. Je ressens que mon temps est compté et que ce compte s'épuise singulièrement. Je ne regarde même pas le résultat et ne fait qu'une photo. Je retourne alors vers le 350D pour prendre encore des photos. Je repars vers le 5D. Je pers mes moyens. J'arrête avec le 5D car je vois que la totalité va bientôt se terminer alors que j'ai l'impression que nous somme qu'au commencement. Denis, toujours enflammé lyriquement confirmera mes pensées: "Ca va se terminer! Regardez les protubérances à 5h!" Sans regarder l'heure, je règle à nouveau le 350D pour prendre en photo les grains de Bailly du troisième contact. Je compte encore deux erreurs de ma part dans les réglages. J'entame alors ma série sur les grains de Bailly à 12h41mn40s. 8 photos plus tard, la totalité touche à sa fin. Déjà!

    12h42mn04s. La totalité se termine et le soleil refait son apparition. Nous sommes au troisième contact. Tout aussi déchaîné, j'effectue 21 photos en 21 secondes. Ma main gauche semble encore alerte mais toujours tremblante. Je remets le filtre. La première photo s'opère à 12h42mn55s. Je sais déjà inconsciemment que je n'ai pas été aussi bon que ce que j'aurais du être. Je sais aussi que j'ai été victime quelque part du trou noir!! Mais où était les 4 minutes de totalité prévues par la théorie?? Je n'ai rien vu passé! C'était trop rapide et trop sublime. Mais c'est aussi ce côté éphémère qui en fait sa beauté. Je continue de faire alors quelques photos à la volée avant de repartir dans mon tempo d'une photo toutes les 2mn30s.

    A peine la totalité terminé que voilà un flot de véhicules passer puis s'arréter devant nous. Et oui, on va attendre qu'el présidente Moubarak parte avant de ré-ouvrir les portes de notre camp. Et voilà qu'un connard d'abruti de sa race s'arrête devant le 5D. Une chance que le soleil soit haut dans le ciel mais j'espère qu'il restera assez haut d'ici 14h. C'est une question de vie ou de mort pour le cher conducteur de ce vilain camping car bleu.

    Sophie, dans une grande classe et un bon savoir vivre digne de la Baronne de Rothschild, nous sort une bouteille de Champagne pour fêter. Bon ok, j'étais au courant vu que j'étais sous la même tente. BRAVO Sophie!!!! EXCELLENTE Initiative. A peine le bouchon expulsé que de nous nous fîmes de nouveau amis égyptien. Merde alors, moi qui pensait que les musulmans ne buvaient pas d'alcool... ;-) Bref, petite rincette petillante et je retourne à mes activités. Il me reste 1h de photos.

    Ca devient la folie autour de nous. Ca grouille dans tous les sens. J'en stresse pour le 5D et la photo du chapelet. Je suis obligé de surveiller chaque photo pour être sur que personne ne se soit mis devant pendant une prise de vue. Pascal viendra me prêter main forte en jouant le garde du corps personnel du 5D. Merci à toi Pascal! Malgré tout, je sens un relâchement de pression en moi. Ce n'est pas plus mal. Je continue mes photos.

    Bon an mal an, le temps passe et se pointe alors le quatrième contact annonciateur de la fin de l'éclipse qui se produira à 13h59mn55s. Il est alors temps pour moi de commencer le rangement tandis que les portes du pénitentier commencent alors à s'ouvrir. El présidente a pris son hélicoptère! Une fois l'éclipse terminé, je pars dans la tente pour prendre une petite collation et je sens alors en moi une formidable relaxation... J'ai envie de crier et de sauter dans tous les sens! Bref, une fois le ventre rempli et les sacs bouclés, direction le car qui nous attend. Nous ne sommes déjà même pas parti que le camp est d'ores et déjà en cours de désinstallation!

    Que retenir de cette éclipse? Que du bonheur! Une envie encore plus forte de voir la prochaine! Elle est prévue le 1er Août 2008, anniversaire de mes 34 printemps. Elle partira du Nord du Canada pour finir en Chine en passant par l'Arctique. Je pense pour le moment à Novosibirsk pour l'observation bien qu'il y ait une chance sur deux d'avoir un ciel couvert. Et c'est un des plus beau score pour cet éclipse!

    Pour terminer ce roman sans fin, car ma composition écrite est inversement proportionnelle à ma verve, je dirais Merci pour tout à Denis et rendez-vous à tous le 1er Août 2008!

3. Photos d'ambiance...


28/03/06 22h22mn

29/03/06 06h26mn

29/03/06 06h27mn

29/03/06 07h19mn

29/03/06 07h35mn

29/03/06 10h04mn

29/03/06 10h06mn

29/03/06 10h31mn

29/03/06 11h50mn

29/03/06 12h13mn

29/03/06 12h15mn

29/03/06 12h24mn

29/03/06 12h41mn08s
Totalité

29/03/06 12h50mn

29/03/06 13h08mn

Les Joyeux


4. Les photos de l'Eclipse Totale.


Premier Contact
09h20mn18s UT


09h40mn01s UT


10h00mn00s UT


10h20mn01s UT


10h37mn02s UT


10h37mn33s UT

Grains de Bailly
10h38mn06s UT

Après Deuxième Contact
10h38mn11s UT

Protubérances
10h38mn47s UT

Basse Couronne
10h39mn19s UT

Couronne interne
10h39mn26s UT

Couronne Moyenne
10h39mn38s UT

Couronne Haute
10h39mn53s UT

Lune Cendrée bleuetée
10h40mn01s UT

Couronne Haute
10h41mn16s UT

Couronne Moyenne
10h41mn23s UT

Protubérances
10h41mn40s UT

Avant Troisième Contact
10h42mn00s UT

Grains de Bailly
10h42mn05s UT


10h42mn11s UT


10h42mn55s UT


11h00mn00s UT


11h20mn02s UT


11h40mn02s UT

Quatrième Contact
11h59mn55s UT


5. L'animation...

   Animation faite à partir de 109 images prises entre 11h20mn18s et 13h59mn55s heure locale (UT+2h) à intervalles réguliers pendant les phases partielles de 11h20mn18s à 11h35mn01s et de 12h45mn07s à 14h00mn03s. Entre 11h35mn et 11h45mn, les photos ont été prises manuellement à la sauvage!
   Animation réalisée avec Jasc Animation Shop 3. L'animation comporte 20 images par seconde.
   Afin de rendre une certaine fluidité dans l'animation, insertion de transition 'fade' entre chaque photo, la longueur de la transition variant suivant les heures exactes de prises de vue des photos.

   Pour plus apprécier l'éclipse lors de la totalité, l'animation a été faite comme suit:

  • De 11h20mn18s à 11h35mn01s : 1s de l'animation = 10mn en réalité (x600)
  • De 11h35mn01s à 12h45mn07s : 1s de l'animation = 30s en réalité (x30)
  • De 12h45mn07s à 13h59mn55s : 1s de l'animation = 10mn en réalité (x600)


Format DivX 6 (2,05Mo)


6. Les images traitées (Chapelet, Protubérances, Composites & Mosaique...)

   Commentaires sur ces images obtenues:

  • Chapelet: Une photo prise toutes les 5mn de 11h20mn à 14h avec filtres solaires sauf celle de 11h40mn47s pendant la totalité. Photos assemblées une après l'autre sous Paint Shop Pro X (fonction 'Lightest' sur deux images)
  • Protubérances: Deux photos des protubérances prises aux deuxième et troisième contacts. Sous Paint Shop Pro X, fonction 'collage comme une nouvelle sélection'.
  • Composite1. Image composite faite à partir d'une photo (200ISO, f/d=11, T=1/30s). Pour réaliser une image composite sous Pait Shop Pro X, copie de la photo, coller comme une nouvelle image, application du flou radial (Spin, Force 10%), soustraction de l'image originale avec cette nouvelle image avec offset de 128. Augmentation du contraste sur la photo obtenue (75%) et application du filtre de réduction du bruit numérique. Puis addition de cette image obtenue avec offset de -128 avec l'image originale.
  • Composite4. Même principe que précédemment pour réaliser une image composite. Sauf qu'ici, l'image de départ est une moyenne de 4 photos. Les quatres photos ont été prises à f/d=11. Photo1: 200ISO et T=1/125s. Photo2: 200ISO et 1/30s. Photo3: 400ISO et T=0.5s. Photo4: 100ISO et T=0.5s.


Chapelet

Protubérances

Mosaique

Composite1

Composite4a

Composite4b

Composite4c


7. La météo... statistiquement et en Anglais...

    Salloum (or As Salloum, or Salum) in Egypt or nearby sites in Libya are likely to be the primary destination for eclipse observers, so it is worthwhile to examine the climatological record in detail for this location. Salloum lies at the bottom of a semicircular bay on the Mediterranean coast, under the looming heights of the Libyan plateau a few kilometers to the west. The boundary with Libya lies on the heights about 15 km distant and the border area would be an ideal observing site if permission can be obtained from the military authorities. Salloum has a high frequency of sunshine, with 75% of the maximum possible recorded in March (Table 21). Clear skies and skies with scattered cloud are observed on more than half of March days and precipitation averages only a few millimeters in the month. Observations reporting dust or sand are recorded on 7% of the hours at eclipse time (Table 21). Less than 1% of March observations recorded visibilities below 1 mi (1.6 km). A little over 6% of observations show a visibility below 5 mi (8 km). Temperatures are cool, with highs of 21°C and overnight lows of 11°C. Cloud cover in Salloum comes almost entirely from the traveling khamsin lows and Mediterranean depressions. Such systems are relatively easy to see coming in satellite imagery, and can be timed by watching movement over several days or hours. The four-lane highway heading east from the community provides a convenient route to look for better skies, especially because most observers will travel to the path from locations such as Marsa Matruh, and will already be familiar with conditions en route.

8. L'évènement relaté par la presse égyptienne...

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